La crèche P’tit d’homme est au cœur d’un projet de transformation des cacas de nos bébés en terreau fertile.
La crèche P’tit d’homme, rue de la Guadeloupe (association Crescendo) est partenaire d’un projet novateur : le compostage des couches des bambins qu’elle accueille. L’idée est celle des Alchimistes, une entreprise solidaire d’utilité sociale (ESUS) qui collecte et composte les déchets organiques (notamment dans les locaux de la ferme souterraine La Caverne) en milieu urbain et circuit court. Après un programme de recherche entamé il y a quatre ans avec le soutien de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME), l’entreprise a pu bénéficier d’un appel à projets lancé par la Direction de la petite enfance de la Ville de Paris (DPEVP).
Outre l’établissement du 18e, quatre autres crèches associatives volontaires se sont associées à l’action et ont permis de collecter quelque 28 000 couches usagées classiques pour les premières expérimentations. « Une des fondatrices des Alchimistes avait son enfant ici il y a quelques années et l’idée émergeait déjà, rapporte Laurence Villiers, directrice de la crèche P’tit d’homme. Quand la DPEVP a proposé ce projet, elle s’est tournée vers Crescendo, qui m’a sollicitée : j’ai dit oui tout de suite. » Les parents ont tous été informés et ont accepté l’idée. L’expérience a débuté en juin 2020.
Des couches 100 % compostables
72 % des composants d’une couche sont compostables (matières organiques, cellulose) mais elles contiennent aussi du plastique qu’il faut séparer de la partie biodégradable. Une machine permet cette séparation mais il reste toujours du synthétique dans le compostable. L’union des Alchimistes avec Les Celluloses de Brocéliande, un des deux fabricants de couches pour bébé en France, a donc donné naissance à un nouveau projet très innovant, « les couches fertiles ». Le fabricant fournit des prototypes de couches 100 % compostables aux cinq crèches partenaires et afin d’évaluer leur dégradabilité en conditions réelles de compostage industriel avant leur mise sur le marché, les Alchimistes ont créé le Couches fertiles LAB (lauréat des Trophées ESS1 en novembre 2020) implanté sur la friche René.e2 à Pantin.
« Nous avons testé les premiers prototypes à partir de septembre 2020 et depuis fin janvier 2021 nous sommes passés à une deuxième version, résume Laurence Villers. L’absorption est aujourd’hui fiable et les couches sont mieux ajustées au corps de l’enfant. » Sa collaboratrice Marie Naudet, éducatrice, est aussi totalement convaincue : « Nous n’utilisons plus que ces prototypes pour la taille 4. Elles sont au moins aussi confortables que les couches classiques, et sont même plus »neutres« : pas d’odeurs, pas de couleurs… » L’équipe, qui opère un retour bimensuel aux Alchimistes sur le nombre de couches utilisées au quotidien et les incidents relevés, n’observe aucun problème d’allergie.
Collectées trois fois par semaines
Les couches sont jetées dans des bacs spécifiques que Les Alchimistes collectent trois fois par semaine. « Il nous faut juste arracher les “scratch”, explique Marie Naudet. Et la collecte se fait en double poubelle mais ce n’est ni une perte de temps, ni bien compliqué. »
A ce jour, environ 1 000 couches ont été traitées (près d’une tonne) par le Couches fertiles LAB et de nouveaux fabricants sont prêts à rejoindre l’aventure. Maïwen Mollet, responsable du projet chez Les Alchimistes, fait le pari que dans un avenir très proche la couche bébé sera fabriquée dans des matériaux 100 % compostables. •