Considérée aujourd’hui comme la première réalisatrice de fiction, Alice Guy a connu le succès en France et aux États-Unis avant de sombrer dans l’oubli.
Le spectacle débute sur un double constat d’échec : la rupture entre Alice et son mari Herbert Blaché et la faillite de sa société de production. Tout avait pourtant si bien commencé. Flashback : une jeune fille est en quête d’un emploi. On lui conseille d’apprendre la sténo et la dactylographie. Une formation qui l’amène à devenir la secrétaire de Léon Gaumont. À cette époque, c’est un industriel commercialisant des appareils d’optique et de photographie.
Doublement amoureuse
Au printemps 1895, les frères Lumière invitent Alice et son patron à découvrir leur dernière invention : le cinématographe. C’est une révélation. Comme Méliès, Alice Guy a une intuition : ce nouveau procédé sera un merveilleux support pour raconter des histoires.Comme La Fée aux choux. Des décors sommaires, des employés du studio s’improvisant acteurs, un bébé braillard. Et le tour est joué ! Gaumont ronchonne, craignant que Mademoiselle Guy néglige son service. Les ventes de cette saynète sans prétention auront raison de ses réticences.
En épousant Blaché, un « opérateur Gaumont », Alice s’exile aux États-Unis. Son mari est chargé de promouvoir le chronophone, un appareil qui synchronise enregistrement sonore et prises de vue. Là-bas, elle crée sa propre maison de production : la Solax. À la profession de cinéaste, elle ajoute donc les fonctions de productrice et de directrice de studio.
Caroline Rainette, metteuse en scène, a été fascinée par l’enthousiasme d’Alice Guy pour une entreprise balbutiante mais riche de promesses. Cette pionnière n’avait-elle pas déclaré : « Le cinématographe était mon prince charmant. » Un parcours qui a inspiré une pièce pédagogique sans être ennuyeuse, féministe sans être revancharde. Le cinéma est présent dans la scénographie. Sont projetées des images témoignant du travail de la cinéaste accompagnées de musiques d’époque. Caroline Rainette incarne Alice Guy avec une élégance enjouée. Ses deux partenaires se partagent les personnages masculins. Lennie Coindeaux passe en un clin d’œil de Blaché à l’opérateur Anatole. Jérémie Hamon endosse les rôles de Léon Gaumont et de Georges Méliès.
On sort de ce spectacle réjoui et revigoré. C’est un hymne à l’audace qui parlera aux filles d’aujourd’hui.
Photo : Luca Lomazzi