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décembre 2022 / A poils ou à plumes, le pavé parisien se partage aussi avec les bêtes

Le rat, ce mal-aimé [Article complet]

par Sylvie Chatelin

Le surmulot rattus norvegicus, plus connu sous son petit nom de « rat » véhicule beaucoup de fantasmes. Sa présence (contrôlée) en ville n’est pourtant pas inutile. Portrait et défense de celui qui accompagne les hommes depuis toujours.

Il y aurait entre 1,5 et 2 rats par Parisien soit 3 à 5 millions de ces rongeurs dans la capitale. Mais sans étude scientifique, il est impossible de connaître l’évolution de leur population. Le rat serait sale, agressif, envahirait Paris et bien sûr serait responsable de la propagation de maladies comme la leptospirose ou la peste. Or cette dernière n’est pas transmise par le surmulot qui peuple maintenant nos égouts et nos parcs mais par le rat noir, rattus rattus, largement supplanté par le surmulot ou rat brun depuis près de trois siècles (apparu en 1753 et décrit comme une espèce différente par Buffon en 1760). Les derniers cas de peste à Paris remontent à 1920 (avec quelques cas dans le 18e) mais depuis, malgré « l’invasion » de rats bruns souvent décrite et décriée, aucun cas n’a été signalé.

Il est vrai qu’on peut lui reprocher certaines dégradations. Comme tout bon rongeur qui se respecte, le surmulot peut grignoter les câbles qui se trouvent sur son chemin souterrain et endommager ainsi certaines infrastructures. Mais sans nier l’inquiétude qu’il suscite et les problèmes sanitaires qu’il peut poser, il reste difficile de tenter de réhabiliter le rat. C’est ce qu’a tenté Douchka Markovic, conseillère de Paris, déléguée auprès du Maire du 18e en charge de la condition animale (Groupe Ecologiste), lors de son intervention le 7 juillet au Conseil de Paris (qui avait suscité de nombreuses moqueries).

Elle explique pourtant dans un entretien récent que « ce qui pose problème c’est la remontée des rats ». Il faudrait donc « les cantonner là où ils jouent un rôle positif », dans les égouts. Là, « ils vont dans des endroits où les égoutiers ne peuvent pas aller ». Ils nettoieraient ainsi plus de 800 tonnes de déchets par an dans les égouts et les rues de Paris. Elle rappelle également que les surmulots sortent essentiellement la nuit et préconise de nettoyer les endroits qu’ils fréquentent plutôt en fin de journée afin de ne pas les attirer, c’est-à-dire, entre autres ramasser les poubelles le soir plutôt que le matin.

Lors de son intervention devant le Conseil de Paris, l’élue avait précisé qu’une expérimentation portée par le chercheur Benoît Pisanu du Muséum d’histoire naturelle allait être menée dans le 11e et le 12e dans ce sens et donnera lieu à un rapport scientifique. A voir donc si cela suffira mais notons que nous avons également tous, individuellement, un rôle à jouer en ne laissant pas traîner nos restes de pique-nique et autres nourritures pour chats libres et pigeons dans les parcs et jardins.

Le service propreté plus présent

La ville de Paris a d’ailleurs pris des mesures dans ce sens en installant des containers et des poubelles rendant les déchets inaccessibles dans les parcs et en « accroissant les tournées de ramassage dans les lieux les plus fréquentés et accueillant le plus de pique-niques, et renforcé le nettoyage de l’espace public ».

Douchka Markovic rappelle cependant que pour elle « la réalité, c’est que les actions menées jusqu’à présent ne fonctionnent pas et sont très coûteuses ». Elle a conclu son intervention du 7 juillet en confirmant « qu’il faut agir mais agir différemment, avec un nouveau regard sur la gestion des surmulots à Paris ». Elle invite à repenser leur place dans la ville et leur cohabitation avec les humains en s’appuyant sur la connaissance scientifique de l’animal.

A tenter car le rat, et maintenant le surmulot, est un animal citadin qui vit auprès des humains depuis toujours et cette colocation n’est pas près de s’arrêter. Autant qu’elle se passe bien pour les uns et les autres.

Dans le même numéro (décembre 2022)

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